Le gouvernement américain est plus pro-Artsakh que le Premier ministre arménien

Par Harut Sassounian
TheCaliforniaCourier.com
Alors que nous perdions tout espoir de voir le gouvernement américain soutenir l’Artsakh, nous avons eu l’agréable surprise de recevoir une lettre d’un haut fonctionnaire du Département d’État, qui affirmait tout ce qu’il fallait pour défendre l’Artsakh.
Cette lettre, datée du 25 septembre 2025, a été rédigée par Paul D. Guaglianone, haut fonctionnaire du Bureau des affaires législatives du Département d’État américain. Bien sûr, il ne faut pas confondre paroles et actes, mais c’est un excellent début. Nous devons assurer le suivi auprès de nos amis du Congrès afin de garantir que le gouvernement américain tienne ses engagements concernant l’Artsakh.
Dans sa lettre, le Département d’État a pris trois engagements importants :
1) « L’administration Trump s’engage à encourager les deux gouvernements [Arménie et Azerbaïdjan] à assurer le retour des Arméniens de souche au Haut-Karabakh dans le cadre d’une paix durable. »
2) « Nous suivons de près les procès des Arméniens de souche détenus en Azerbaïdjan, et des représentants de l’ambassade des États-Unis à Bakou assistent aux audiences chaque fois que possible.»
3) « Enfin, nous continuons d’appeler le gouvernement azerbaïdjanais à protéger les sites du patrimoine arménien du Haut-Karabakh.»
Ces trois phrases reflètent les principales revendications arméniennes concernant l’Artsakh. Le gouvernement américain n’a jamais pris de tels engagements auparavant. Nous espérons qu’ils seront mis en œuvre et ne resteront pas lettre morte.
Il faut comprendre que la lettre du Département d’État n’est pas née de rien. Elle est le fruit d’un lobbying persistant de la communauté arméno-américaine. Au cours des derniers mois, les défenseurs et sympathisants arméno-américains ont envoyé plus de 100 000 courriels et appels téléphoniques via les plateformes nationales, régionales et locales du Comité national arménien d’Amérique (ANCA), exhortant les membres du Congrès à cosigner la lettre adressée au secrétaire d’État Marco Rubio. Quatre-vingt-sept membres du Congrès ont cosigné la lettre, envoyée à M. Rubio le 23 juillet 2025, demandant au gouvernement américain de soutenir le retour des Arméniens déplacés de force en Artsakh, d’obtenir la libération des prisonniers arméniens détenus illégalement à Bakou et de protéger les sites religieux et culturels arméniens en Artsakh.
La lettre du Congrès rappelait au secrétaire d’État l’ordonnance provisoire de la Cour internationale de Justice de décembre 2023 obligeant l’Azerbaïdjan à autoriser le retour des Arméniens en Artsakh.
Comment se fait-il que le gouvernement américain se soucie davantage des droits des Arméniens d’Artsakh que Nikol Pachinian, le Premier ministre arménien ? Après avoir proclamé avec audace en 2019 que « l’Artsakh est l’Arménie, point final », Pashinyan a fait exactement le contraire en reconnaissant que l’Artsakh appartient à l’Azerbaïdjan. Pire encore, Pashinyan a déclaré la semaine dernière à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe : « Je considère que la question du retour des réfugiés [d’Artsakh] dans ce contexte est dangereuse pour le processus de paix. » Au lieu de cela, il a exhorté les Arméniens d’Artsakh à « s’installer en République d’Arménie ». Il a ensuite ajouté : « L’Arménie et l’Azerbaïdjan doivent se laisser tranquilles, se concentrer sur la coopération économique et établir progressivement un dialogue. »
Pashinyan a non seulement abandonné le droit au retour des Arméniens d’Artsakh, mais a également ignoré le sort des Arméniens emprisonnés à Bakou, craignant qu’en cas de libération et de retour à Erevan, ils ne remettent en cause son régime.
Le dernier signe en date de l’inaction de Pashinyan pour obtenir la libération des prisonniers arméniens est son interaction maladroite avec le président… Donald Trump à la Maison Blanche le 8 août. Lorsque Trump lui a demandé s’il « souhaitait la libération de ces chrétiens. » Pashinyan a honteusement demandé à Trump de ne pas inclure de référence aux prisonniers d’Artsakh dans le protocole d’accord devant être signé par lui-même, le président Aliyev et le président Trump. Étonnamment, Trump s’est alors porté volontaire pour aider à la libération des prisonniers en disant à Pashinyan : « J’appellerai Aliyev. Il me le rendra service. » Trump a ensuite ajouté : « En cas de problème, appelez-moi directement. Je réglerai le problème. »
Deux mois plus tard, Pashinyan n’a manifesté aucune envie de rappeler à Trump sa promesse d’appeler Aliyev. Lorsqu’un journaliste arménien lui a récemment demandé s’il connaissait le numéro WhatsApp de Trump, Pashinyan a répondu évasivement : « Je ne peux pas divulguer la liste de mes numéros WhatsApp. »
Le seul point noir dans la lettre du Département d’État du 25 septembre, pourtant bien accueillie, est l’utilisation du terme « corridor », un terme privilégié par l’Azerbaïdjan, pour décrire le projet de route reliant l’Azerbaïdjan continental à son enclave du Nakhitchevan via l’Arménie. Trump a également utilisé à tort le terme « corridor » à deux reprises lors de sa réunion à la Maison Blanche. De plus, depuis le 8 août, Trump a déclaré à plusieurs reprises, à tort, avoir résolu le conflit entre l’Albanie (au lieu de l’Arménie) et l’Azerbaïdjan, et a également confondu l’Azerbaïdjan avec le Cambodge.
Malheureusement, ni la lettre signée par 87 membres du Congrès ni la réponse du Département d’État n’ont mentionné le fait important que les troupes azéries occupent une partie du territoire de la République d’Arménie depuis 2021, sans aucune intention de partir prochainement. Pachinian, malgré sa responsabilité constitutionnelle de protéger les frontières de l’Arménie, a ignoré l’occupation étrangère du territoire de la République et, lorsqu’on lui a demandé ce qu’il comptait faire pour le libérer, sa réponse a été : « rien ».
Comment un traité de paix peut-il être signé entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan alors que l’ennemi occupe le territoire arménien ?