Par Harut Sassounian
TheCaliforniaCourier.com
Depuis le génocide arménien de 1915, les Arméniens se battent sans relâche pour informer le monde de l’extermination systématique de 1,5 million d’Arméniens perpétrée par l’Empire ottoman.
Plus de 30 pays, plusieurs organisations internationales et d’éminents spécialistes du génocide ont ainsi reconnu la véracité du génocide arménien. Après toutes ces reconnaissances, le génocide arménien est devenu un fait avéré, ce qui constitue un véritable démenti à la propagande négationniste de la Turquie. Malheureusement, quelques grands pays, comme le Royaume-Uni et Israël, ne l’ont pas encore reconnu, non par ignorance, mais par opportunisme politique et par désir d’apaisement envers la Turquie. L’ère de la reconnaissance doit donc être considérée comme révolue.
Le problème est qu’après des décennies de campagnes pour la reconnaissance du génocide, Arméniens et non-Arméniens, y compris les responsables turcs, en sont arrivés à la conclusion erronée que la reconnaissance est l’objectif ultime. Il s’agit d’un malentendu fondamental. Nos véritables revendications sont la restitution et le retour de l’Arménie occidentale. Une fois que la Turquie aura compris que la négation du génocide n’empêchera pas les Arméniens de poursuivre ces deux autres objectifs, Ankara pourrait enfin prendre conscience de la futilité de sa campagne négationniste.
Néanmoins, la campagne mondiale de reconnaissance du génocide n’a pas été vaine. Le monde connaît désormais la vérité sur le génocide arménien. 110 ans plus tard, le gouvernement turc est toujours confronté à des rappels embarrassants des crimes odieux commis par son prédécesseur.
Cependant, la simple reconnaissance du génocide arménien et la présentation d’excuses ne guériront pas les blessures ni n’en effaceront les conséquences. Les Arméniens attendent toujours justice, le rétablissement de leurs droits historiques et la restitution de leurs terres et biens confisqués.
En 1915, l’Empire ottoman a mené une campagne systématique visant à expulser une nation entière de sa patrie ancestrale, privant les survivants de leurs foyers, de leurs terres natales, de leur patrimoine culturel, de leurs lieux de culte et de leurs biens personnels. Une injustice flagrante a été perpétrée contre le peuple arménien, lui donnant droit, comme lors de la Shoah, à une compensation légitime pour ses immenses pertes.
La restitution peut prendre de nombreuses formes. Dans un premier temps, la République de Turquie doit restituer les 2 500 églises arméniennes à l’Arménie, les plaçant sous la juridiction du Patriarcat arménien d’Istanbul. Ces églises confisquées, transformées en mosquées, en écuries, en entrepôts ou démolies, doivent être restituées à leurs propriétaires légitimes.
La République de Turquie actuelle, en tant qu’État successeur de l’Empire ottoman, doit être tenue juridiquement responsable du génocide et de ses conséquences persistantes. La Turquie a hérité des biens de l’Empire ottoman et, par conséquent, de ses dettes.
Malheureusement, les proclamations présidentielles et les résolutions commémoratives du Congrès sur le génocide arménien n’ont aucune force de loi et, par conséquent, aucune conséquence juridique.
Sans plus d’un siècle d’attente, les Arméniens doivent intenter une action en justice devant les tribunaux internationaux et nationaux, notamment :
– La Cour internationale de justice (Cour internationale), où seuls les États ont compétence,
– La Cour européenne des droits de l’homme,
– Les tribunaux fédéraux américains, ainsi que les tribunaux d’autres pays.
Le gouvernement arménien actuel n’a aucun intérêt à intenter des poursuites contre la Turquie pour le génocide arménien devant la Cour internationale. Les Arméniens-Américains doivent donc intenter eux-mêmes une action en justice. Au lieu de faire pression pour une nouvelle résolution symbolique, ils doivent faire pression sur la Chambre des représentants et le Sénat pour qu’ils prolongent le délai de prescription, permettant ainsi aux Arméniens d’intenter des poursuites pour les pertes matérielles causées par le génocide.
Une fois ce projet de loi adopté par la Chambre des représentants et le Sénat, il sera soumis au Président pour ratification. Cette législation s’inspirerait du cadre juridique des lois existantes sur la restitution des œuvres liées à l’Holocauste, telles que :
— « la loi sur la réparation des victimes de l’Holocauste », promulguée par le Congrès américain en 1998 ;
— « la loi de 2016 sur la récupération des œuvres d’art expropriées de l’Holocauste »;
— le projet de loi 2867 de l’Assemblée de Californie, signé par le gouverneur Gavin Newsom en 2024 : « Récupération des œuvres d’art et des biens personnels perdus en raison des persécutions ».
Une fois les poursuites engagées devant les tribunaux américains, elles attireront l’attention du monde entier, obligeant la Turquie à affronter son passé criminel devant la justice. Les dénégations persistantes du gouvernement turc concernant le génocide perdraient alors tout leur sens.
Les tribunaux américains pourraient rendre des jugements juridiquement contraignants obligeant la Turquie à indemniser les Arméniens pour leurs pertes. Si la Turquie refuse de s’exécuter, les tribunaux pourraient alors ordonner la confiscation de tous les biens appartenant au gouvernement turc aux États-Unis, tels que les bâtiments, les comptes bancaires et les avions de Turkish Airlines. Pour lancer cette bataille juridique historique, les Arméniens doivent prendre deux mesures immédiates :
1) Faire pression sur le Congrès pour qu’il adopte une loi autorisant ces revendications ;